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AUX SOURCES DU LANGAGE

La communication - Les animaux - Hypothèses anciennes - Préhistoire -

III - L'apparition du langage : hypothèses anciennes

Possédons-nous de naissance la capacité de langage, ou est-ce le résultat d'un apprentissage ? Dans le passé, la question a été traitée par les philosophes, avant d'être abordée par les scientifiques et les linguistes. Nous allons donc passer en revue quelques théories philosophiques avant d'envisager quelques hypothèses plus précises, et parfois pittoresques.

Honneur au plus ancien : Platon, avec son père spirituel Socrate. Dans le Cratyle, Platon, au IVème siècle avant J.-C., développe une réflexion sur le langage, manipulant des notions phonétiques déjà élaborées ainsi que des notions grammaticales. La question posée est : les noms des choses sont-ils tirés de la nature des choses ? La position de Socrate dans le Cratyle est que les choses périssables portent des noms de convention, dus au hasard, mais que les choses éternelles portent des noms naturels, donnés par les dieux. Y a-t-il une création de noms dits naturels au moyen d'onomatopées ? On peut deviner là en germe une problématique qui conduira Ferdinand de Saussure († 1916) à affirmer l'arbitraire du signe (le caractère conventionnel des noms), position qui était déjà finalement un peu celle d'Aristote.

Au XVIIème siècle, l'innéisme est la doctrine de Descartes : nous avons selon lui trois sortes d'idées : a) venant du dehors b) venant de l'imagination c) innées. Ainsi, les idées mathématiques sont innées, espérons que les étudiants en Lettres en soient convaincus... C'est Dieu qui garantit la vérité de ces idées. Dans la 5ème Méditation, Descartes écrit : « Lorsque je commence à les découvrir, il ne me semble pas que j'apprenne rien de nouveau, mais plutôt que je me ressouviens de ce que je savais déjà auparavant, c'est-à-dire que j'aperçois des choses qui étaient déjà dans mon esprit, quoique je n'eusse pas encore tourné ma pensée vers elles. » On peut ici légitimement penser à la théorie de la Réminiscence de Platon, selon laquelle notre âme, avant de venir dans le corps, a contemplé les divines Idées, et s'en ressouvient durant la vie.

Fin XVIIème siècle, Locke, au contraire, répond que ces idées ne se trouvent ni chez l'enfant ni chez les primitifs, et que nos connaissances viennent de nos expériences et de nos sensations. La philosophie de Locke est matérialiste.

Leibnitz, après Descartes, se déclare « pour l'idée innée de Dieu ».

Au XVIIIème siècle, Rousseau affirme que la conscience morale est innée : quand le bien et le mal se présentent à nous, nous les reconnaissons immédiatement, en aimant le bien et détestant le mal.

Toujours au XVIIIème siècle, selon Kant, « si toute notre connaissance débute avec l'expérience, cela ne prouve pas qu'elle dérive toute de l'expérience » (Critique de la raison pure). Cette position est intéressante, car elle envisage à la fois des connaissances acquises, mais des capacités innées. Ceci nous rapproche des positions des linguistes modernes.

Précisément, le linguiste qui s'est le plus engagé en ce sens est Noam Chomski, mais nous aborderons ses positions dans le chapitre suivant, consacré aux recherches récentes.

Diverses théories on été élaborées par des gens sérieux, qui ont imaginé quelles pouvaient être les premières formes du langage humain. En voici quelques-unes qui ont été affublées de qualificatifs pittoresques :

Aucune de ces théories n'apporte une explication complète. Si certaines d'entre elles expliquent des inventions de mots, cela ne peut suffire à expliquer l'invention du langage, qui repose non seulement sur des mots, mais sur une syntaxe.

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